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COVID-19 ou vaccination ? Si vous avez une maladie auto-immune, choisissez la vaccination anti-SARS-Cov 2 !

Une étude publiée dans Nature Communication ce 9 mars 2023 s'intéresse au développement d’auto-anticorps dans deux situations : l'immunisation anti-SARS Cov2 par vaccin à ARN messager ou la COVID-19. L'objectif étant d'évaluer si la vaccination confère le même risque de développer des auto-anticorps que la maladie infectieuse.
un article rédigé par Sylvain DUBUCQUOI 30/03/2023

La question

Les vaccins à ARN anti SARS-COV2 ont montré leur efficacité dans la prévention des formes graves de COVID-19. Il a également été montré, dans de rares cas, qu’ils pouvaient être associés à des effets indésirables, dont des poussées de maladies auto-immunes chez des patients qui en souffraient déjà.

Ces observations associées au fait qu’on a rapporté une association entre infection par le SARS-COV2 et le développement d'auto-anticorps, amènent la question de savoir si les vaccins anti-COVID-19 favorisent le développement d'auto-anticorps, en particulier chez des patients souffrant déjà de maladies auto-immunes ?

  • Public : Grand Public,
  • Temps de lecture : 6 minutes
  • Un article relu par : ...

Un lien entre vaccin ARN anti COVID-19 et auto-immunité ? Protocole d'étude :

L'infection virale par le SARS-Cov2 a été associée au risque de développer d'auto-anticorps, particulièrement dans le cadre d'infection sévères. Chez les patients, si certaines des auto-réactivités préexistent à l'infection, d'autres émergent clairement dans les suites de celle-ci.

**Les auteurs du travail se sont posés ici la question de savoir si une vaccination par l'ARN codant la protéine Spike du coronavirus pouvait également faire émerger de nouvelles autoréactivités. **

  • Pour répondre à la question, ils ont suivi l'émergence de nouvelles autoréactivités chez différentes populations d'individus qui recevraient le vaccin (groupe 1) et chez des patients souffrant d'une infection modérée à sévère par le SARS-Cov2 (groupe 3).
  • Une population d'individus non vaccinés (groupe 2) servait de contrôles au groupe 1 ; une population de sujets souffrant de myocardites post vaccinale était également analysés (groupe 4).
Groupe 1

Il était composé de différentes populations. L'ensemble de ces individus recevraient le vaccin ARN Pfizer

  • Des personnels de santé (n= 33)
  • Des patients souffrant de différentes MAI (SEP n = 13, PR n = 13, Lupus n = 1, Diabète n = 1, Crohn n = 1) et une population de sujets sains appariés (n = 25)
  • Des volontaires sains ayant reçu 2 doses de vaccin inactivé 4 semaines avant et qui recevaient le vaccin ARN au titre de rappel.
  • Les prélèvements ont été réalisés avant la vaccination et entre 28 et 90 jours de l'injection de rappel (durée totale 4 mois)
Groupe 2 :

Une population d'individus non vaccinés (14 sujets sains et 12 patients souffrant de diabète de type I) permettait de suivre l'émergence éventuelle de nouvelles auto-réactivités et leur dynamique d'apparition. Elle servait de contrôle à la population du groupe 1.

Groupe 3 :

Il était composé de 36 patients souffrant de formes modérées de COVID-19 et de 23 patients souffrant de formes sévères de COVID-19

  • Les prélèvements ont été réalisés dans les 2 mois qui ont suivi l'infection
Groupe 4 :

Il était composé de 8 patients ayant développé une myocardite dans les suites de l'immunisation par le vaccin à ARN

Pour les groupes 1,2 et 4, la mesure des réactivités Ac anti- antigènes extracellulaires de SARS-Cov2 et domaine RBD de l’antigène S1 et vis-à-vis d’un large panel d’auto-antigènes a été réalisée par une approche "REAP" (rapid extracellular antibody profiling), basée sur une plateforme d’expression de 6 183 protéines extracellulaires humaines et domaines RBD de différents coronavirus. Pour le groupe 3, la même méthodologie a été développée, mais les réactivités ont été mesurées vis à vis d'un panel plus restreint d'auto-antigènes : 2 777 (versus plus de 6 000 pour les autres groupes).

Les résultats

Principaux résultats de l'étude

De manière générale, les auteurs ont mesuré un très faible niveau d'émergence de nouvelles autoréactivités chez les sujets immunisés par le vaccin à ARN (groupe 1 : 1.45% de nouvelles réactivités), que les patients souffrent de maladies auto-immunes (MAI) ou non.

Ces chiffres sont tout à fait comparables à ceux observés dans la cohorte d'individus non vaccinés (sains ou souffrant de MAI).

En revanche, ils ont observé que la moitié des individus développant la COVID-19 modérée à sévère, développent au moins une nouvelle autoréactivité dans les 2 mois qui suivent l'infection. Au total c'est 5.18% de nouvelles réactivités mesurées dans ce groupe de patients (groupe 3). Les facteurs de risque pour développer de nouvelles réactivités sont : sexe féminin, âge élevé et score de gravité de la maladie élevé.

Dans le groupe 4 (patients ayant développé une myocardite dans les suites immédiates de la vaccination), les auteurs de cette étude n'observent pas plus d'auto-anticoprs que dans les groupes contrôles.

Selon les auteurs ces résultats sont comparables à ceux déjà publiés et rapportant le risque de développer des auto-anticorps après l'infection par le SARS-Cov2. Ils soulignent d'ailleurs que pour le groupe de patients ayant développé la COVID-19, l'étude de suivi de l'émergence des autoréactivités a été moins longue que celle des individus vaccinés (2 mois versus 4 mois) et que le nombre d'auto-antigènes cibles était également moindre (2 777 dans le groupe 3 versus 6 183 dans les autres groupes (1/2 et 4)).

Résultats accessoires

Chez les patients du groupe 1 souffrant de MAI, certains étaient sous traitement, dont thérapie déplétive anti-CD20 (patients souffrant de SEP), ou anti TNF (patients souffrant de PR). La majorité de ces patients développent une réponse vaccinale, mais fait intéressant, parallèlement au test ELISA classique ou REAL mesurant le développement d'Ac anti RBD, les auteurs ont développé une approche d’évaluation des capacités de neutralisation des anticorps vaccinaux. Deux résultats :

  • il n’y a pas de corrélation entre les titres des Ac (ELISA ou REAP) et les capacités de neutralisation,
  • Les anticorps des patients sous anti-CD20 mais aussi sous anti-TNF n’ont qu’une faible capacité de neutralisation. Les auteurs en concluent que la mesure du titre des anticorps anti SARS-Cov2 n’est pas toujours un bon reflet de la capacité de protection.

Limites de l'étude

  • Le nombre d'individus dans chaque groupe suivi reste faible
  • La durée d'évaluation de l'émergence des réactivité est courte. D'un autre côté, un suivi sur une durée prolongée pourrait remettre en question le (potentiel) lien entre vaccination (ou infection) et l'apparition des auto-anticorps.
  • Il s'agit ici de développement d'autoréactivités et (heureusement) non de développement de MAI.
  • Les autoréactivités ont été évaluées vis à vis d'une librairie d'auto-antigènes et non pas des antigènes classiquement associés aux MAI.

Conclusion

- COVID-19 ou vaccination ? ne vous posez pas la question, dans tous les cas choisissez la vaccination !

Pour en savoir plus

- Sur le thème : "infections virales et immunité"
- Sur le thème : "COVID"

Covid-19 chez le sujet obèse : les mécanismes de l’inflammation dans le tissu adipeux décryptés La dette immunitaire : Mythe ou réalité ?

  • Pour les membres du Collège, je partage une présentation powerpoint mise au format vidéo à télécharger (moins de 2 minutes, sans bande son, mais "lisible") sur les liens entre COVID et autoimmunité (revue de la littérature et question)
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